Communiqué LFR / Afghanistan is not safe
21 Février 2022
Des Afghan.e.s toujours à la recherche de protection
Le 7 février 2022, le Ministre Jean Asselborn s’exprimait devant la presse pour présenter le bilan annuel en matière d’asile et d’immigration.
« En 2020 et 2021, 83 demandeurs d’asile afghans se sont vu refuser le statut de réfugié. Entretemps, 36 ont pu profiter de la seconde chance offerte par les autorités luxembourgeoises. »1
Si nous saluons le fait que les personnes arrivées après la chute du gouvernement afghan aient obtenu un statut de protection, et que la situation de certain.e.s Afghan.e.s débouté.e.s ait été revue, nous déplorons le maintien de décisions de refus dans d’autres cas. Le Ministère affirme qu’il n’existe pas de persécution de masse en Afghanistan et que la prise de pouvoir des Talibans a mis fin au conflit armé qui y sévissait, de sorte qu’à l’heure actuelle, il n’est pas démontré que tou.te.s les ressortissant.e.s afghan.e.s auraient besoin d’une protection internationale.
Or, l’UNHCR publie ce mois une nouvelle note sur les besoins de protection des personnes fuyant l’Afghanistan et spécifie clairement l’inverse :
“While UNHCR considers that in many cases it will be possible to establish, based on the profile of the applicant and the evidence available to date about the situation in Afghanistan, that the applicant is a refugee within the terms of the 1951 Convention, the reverse does not hold true. UNHCR considers that presently it is not possible to determine with the requisite degree of certainty that an Afghan asylum seeker is not in need of international refugee protection.”2
Pour l’UNHCR, il n’est à ce jour pas possible de déterminer si une personne n’a pas de besoin de protection.
Un autre document attire notre attention. Le Ministère avait suspendu l’examen des dossiers en attendant un rapport de l'EASO3 sur la situation en Afghanistan. Dans ce rapport publié en novembre 2021, l’EASO explique :
"Please take into account that the COI referred to in this document is generally limited to events taking place until 31 August 2021. Where more recent developments are taken into account, this is specifically mentioned within the document. The reader is reminded to always consider the available relevant and up-to-date COI at the time of taking the decision."
Comment expliquer aux DPI afghan.e.s que le document tant attendu par le Ministère pour statuer sur leur décision ("en l'absence de sources d'informations complètes et fiables"), ne prend pas finalement en compte l'entièreté des violations des droits humains ayant eu lieu en Afghanistan depuis le 31 août 2021 ?
Au Luxembourg aujourd’hui, nous voyons toujours des femmes afghanes pour qui la protection a été refusée. Beaucoup sont issues de l’ethnie hazara historiquement persécutée par les Talibans ; certaines étaient institutrices et fuyaient les Talibans qui leur refusent le droit d’exercer ce métier. Dans d’autres cas encore, ces femmes fuyant leur pays natal par crainte d’être mariées de force, se voient rétorquer que cette crainte est « purement hypothétique ». Pour des hommes afghans, le refus a été maintenu alors qu’ils expliquaient fuir un enrôlement dans les rangs talibans.
Le Ministère refuse donc la protection internationale à ces personnes en leur expliquant que leurs craintes sont hypothétiques. En parallèle, il leur fait miroiter la possibilité de rester au Luxembourg si elles remplissent les conditions pour d’autres types de titre de séjour (travailleur salarié si elles trouvent un travail ; membre de famille si elles ont de la famille au Luxembourg…). Cette position que les autorités luxembourgeoises présentent comme un compromis pragmatique est surtout inhumaine : elle revient à nier le besoin de protection des personnes les plus vulnérables et les plus isolées qui n’auraient pas accès à d’autres titres de séjour.
Notons également que les demandes de regroupement familial envoyées après la prise de pouvoir des Talibans ont été refusées sans prise en compte de la définition de la famille en Afghanistan (bien plus large qu’au Luxembourg) ; de l’unité familiale ; et de la situation du ou des membre.s de famille encore en grave danger en Afghanistan.
Nous enjoignons le Ministre et son administration à protéger les Afghan.e.s de manière effective, car nous sommes d’accord sur le point suivant : «Le drame afghan se poursuit»4.
Signataires: LFR (ACAT, AIL, ASTI, CARITAS, CLAE, Fondation Maison Porte Ouverte, Passerell, Médecins du Monde, Reech Eng Hand, RYSE) et Afghanistan is not safe : OH! Open Home - Oppent Haus Asbl, Afghan-Lux community outreach, Time for Equality
1 https://lequotidien.lu/politique-societe/asselborn-le-drame-afghan-se-poursuit/
2 UN High Commissioner for Refugees (UNHCR), UNHCR Guidance Note on the International Protection Needs of People Fleeing Afghanistan, Février 2022, disponible sur : https://www.refworld.org/docid/61d851cd4.html
3 Bureau européen d’appui en matière d’asile, récemment renommé Agence de l’Union européenne pour l’asile.
4 https://lequotidien.lu/politique-societe/asselborn-le-drame-afghan-se-poursuit/
Novembre 2021
Mise à jour concernant les informations disponibles sur l’Afghanistan
En octobre 2021, le LFR et la plateforme Afghanistan is not safe publiaient un communiqué de presse alertant sur les effets de la suspension de la prise de décision administrative et contentieuse dans le chef des demandeur.e.s de protection internationale afghan.e.s.
Depuis novembre 2021, la Direction de l'immigration procède à une ré-analyse de certains dossiers de demandeurs de protection internationale.
Passerell publie un recueil de sources concernant des informations actualisées et classées selon les situations différentes que peuvent présenter les DPI afghan.e.s à destination notamment des demandeur.e.s et de leurs avocats.
(attention : Alors que la publication de ce rapport était l'une des justifications avancées par le Ministère pour suspendre les décisions des demandeur.s.e.s afghan.e.s, afin d'avoir les dernières informations à jour pour statuer sur les demandes, veuillez noter, sur la portée du rapport :"Please take into account that the COI referred to in this document is generally limited to events taking place until 31 August 2021. Where more recent developments are taken into account, this is specifically mentioned within the document. The reader is reminded to always consider the available relevant and up-to-date COI at the time of taking the decision."
Communiqué LFR / Afghanistan is not safe
27 Octobre 2021
Afghan.e.s au Luxembourg : quelle justification à l’attente ?
Le 14 octobre 2021, l’Assemblée Générale de l’ONU élisait au Conseil des droits de l’Homme 18 membres pour le mandat 2022-2024, dont le Luxembourg. Dans sa note verbale datée du 26 mai 2021, adressée au Président de l’Assemblée générale, le Luxembourg mettait en avant son engagement général à soutenir l’Etat de droit.
Nous félicitons le Grand-Duché et saluons son élection. La note précise que « 14. Lutter contre la remise en cause […] des droits des réfugiés et migrants, et poursuivre ses efforts pour renforcer ces droits »1 sera l’un des objectifs visés.
Néanmoins, depuis la chute du régime afghan aux mains des talibans, les propos du Ministre Jean Asselborn portent à confusion.
Lors du forum à haut niveau sur la protection des Afghan.e.s à risque organisé par la Commission européenne le 07 octobre, Monsieur le Ministre a affirmé : « que la situation actuelle en Afghanistan exige une "réponse imminente et coordonnée" de la part des partenaires internationaux, rappelant qu'il faut mettre en place des solutions à court terme et à long terme, ainsi que des voies de protection aux plus vulnérables. » Nous ne comprenons pas que ce caractère d’urgence ne s’applique pas au Luxembourg.
En effet, au Grand-Duché, la prise de décision administrative concernant les demandes de protection internationale des ressortissants afghan.e.s est totalement suspendue. Quant aux affaires en cours devant les juridictions administratives, les juges ont adhéré sans nuance à la démarche du gouvernement et ont accepté de suspendre les procédures au moins jusqu’à janvier 2022. Le Ministère serait en effet en attente d’un rapport du Bureau européen d’appui en matière d’asile (EASO) sur l’Afghanistan, et prétend ne pas disposer à ce jour d’informations suffisantes pour prendre position.
Pourtant, le Luxembourg n’a aucune obligation d’attendre le rapport d’une instance spécifique pour statuer sur des demandes de protection internationale. Les rapports déjà disponibles sont unanimes : la prise du pouvoir et les intentions des talibans constituent une dégradation dramatique de la situation générale. Vendredi 15 octobre encore, un attentat suicide revendiqué par l’Etat islamique a été perpétré dans une mosquée chiite de Kandahar tuant 40 personnes et en blessant 70.
Dans un communiqué du 01 octobre 2021, le Ministre utilise la position du HCR datant d’aout 2021 afin de justifier cette suspension. Notre compréhension de ce document était que dans l’attente d’informations fiables, le HCR avançait qu’il était prématuré de refuser les demandes de protection internationale. En aucun cas le HCR signifiait qu’il faille geler la prise de décision. Le HCR insiste même à prendre en compte le « changement de circonstances » si les personnes déboutées venaient à déposer une nouvelle demande.
Le retard pris dans la prise de décisions a des conséquences directes et réelles sur les Afghan.e.s au Luxembourg. Tous ceux qui sont dans l’attente d’une décision souffrent profondément de l’incertitude sur leur sort. Beaucoup d’entre eux attendent l’issue de leur procédure pour pouvoir enfin faire venir leur famille encore bloquée en Afghanistan. En effet, le regroupement familial est inaccessible aux demandeurs de protection internationale tant qu’ils n’obtiennent pas cette protection.
C’est pourquoi les membres du LFR et les associations de la plateforme Afghanistan is not safe exhortent l’administration et les juridictions à reprendre au plus vite la prise de décisions en fondant leur analyse des demandes individuelles sur des rapports sérieux et récents. Le principe d’étude individuelle de la demande est une obligation internationale du Luxembourg au titre du droit international des réfugiés. Ce principe fait peser sur le Luxembourg une obligation positive d’étude sérieuse de la situation. La prise de décision ne peut simplement pas être paralysée en mettant en avant l’attente de documents divers et variés.
En annexe, nous proposons une liste non-exhaustives de sources fiables sur la situation afghane.
En ce qui concerne les procédures de regroupement familial, nous demandons au Ministre de garder une interprétation large de la loi afin de protéger le plus grand nombre.
Signataires:
LFR (ACAT, AIL, ASTI, CARITAS, CLAE, Fondation Maison Porte Ouverte, Passerell, Medecins du Monde, Reech Eng Hand, RYSE) et Afghanistan is not safe : OH! Open Home - Oppent Haus Asbl, Afghan-Lux community outreach, Time for Equality
- Communiqué + Sources récentes sur la situation sur place
- Afghanistan is not safe : il est urgent d’agir ! 23/08/2021
Octobre 2021 : Face à l'urgence humanitaire, on a décidé d'attendre...
A l'occasion de la 76e session de l'Assemblée générale des Nations unies à New York, le Ministre Jean Asselborn a réitéré l'importance pour l'UE, ainsi que pour ses partenaires internationaux, de venir au secours des Afghans qui fuient le régime taliban.
Le retour des fondamentalistes talibans est une menace pour les droits et la vie de la population civile. Le ministre partage ce constat.
Il assure qu’il n’y aura pas d’expulsion du Grand-Duché et qu’il souhaite trouver une solution pour les Afghans au Luxembourg. Il s’agit d’un discours progressiste et cohérent avec l’approche française et allemande notamment.
En pratique, un attentisme injustifié ?
Ce qui est moins clair, c’est que le Ministre nous dit que le statut administratif des Afghans au Luxembourg est une question secondaire. Et d’ajouter qu’il s’agit principalement de personnes arrivées grâce au regroupement familial.
Nous comprenons par-là que ces demandeurs d’asile n’ont peut-être pas été directement et personnellement persécutés? C'est oublier un peu vite que les personnes regroupéees sont principalement des femmes dont la situation en Afghanistan est justement la principale inquiétude!
A titre d’exemple, le 3 septembre 2021, les Talibans ont publié un décret forçant les femmes afghanes à se marier aux Talibans dans deux provinces du nord du pays. La « commission culturelle » a ordonné aux autorités administratives et religieuses de dresser dans chaque village des listes de jeunes filles célibataires et de veuves de moins de 45 ans pour être mariées de force aux combattants talibans.
Face à l’urgence, le ministère suspend toute décision pendant plusieurs mois…
La logique d’une baisse de la protection des Afghans par le Luxembourg, que nous avions déjà dénoncée en mai au sein du collectif "Afghanistan is not safe", (voir ci-dessous) est désormais rattrapée de manière incontestable et flagrante par la réalité. Dans cette tendance malheureusement assez claire, nous ne comprenons pas pourquoi il y a lieu de suspendre les décisions.
Face à une situation urgente sur le plan humanitaire, l’administration décide de prendre le temps. Sauf que pour certains demandeurs d’asile afghans, le tour était venu de recevoir une réponse à leur demande d’asile. En cas d’octroi du statut de réfugié ou de la protection subsidiaire, cela ouvre la possibilité de pouvoir protéger ses enfants, son ou sa conjointe.e. Donc le temps que s’octroie l’administration face à l’urgence humanitaire peut porter un préjudice à ces personnes.
Il est vrai qu'il ne suffit pas, désormais, de recevoir une autorisation d’entrer au Luxembourg que réussir à sortir d'Afghanistan. Les Talibans ont interdit aux afghans de quitter leur territoire. Mais ce n’est pas la même chose si le regroupement familial est empêché par l’administration luxembourgeoise ou par le régime taliban !
Une subordination de la justice au politique ?
Pour les demandes d’asile d’afghans qui ont fait l’objet d’un refus et qui ont introduit un recours devant les juridictions administratives, le ministère a également demandé aux juridictions une rupture de délibéré jusqu’à janvier. Cette demande s'appuie de manière assez fantaisiste sur l'article 26 (3) de la loi du 18 décembre 2015 qui ne concerne aucunement le contentieux devant les juridictions administratives mais bien les décisions initiales de l'administration.
L'objectif revendiqué de la partie étatique est de pouvoir prendre position sur le rapport attendu en novembre 2021 par l'EASO (European Asylum Support Office) sur la situation en Afghanistan. Cette institution est une émanation des états membres alors qu’il existe une série d’autres sources d’informations sur la situation : prises de position de l’UNHCR, le rapport d'Amnesty International. Quelle que soit la source, il est clair que la prise du pouvoir et les intentions des talibans constituent une dégradation de la situation générale. Rappelons qu’il y a encore deux ans, la Cour Administrative de Luxembourg protégeait de manière constante les demandeurs afghans compte tenu de la "violence aveugle eu égard à la situation de conflit armé interne sévissant actuellement en Afghanistan".
Particulièrement inquiétant, lors d’une audience au tribunal du lundi 20 septembre 2021, un magistrat a déclaré lors d’une audience sur le sujet : « on attend de savoir ce que le ministère va faire ».
L’un des précieux principes de l’état de droit est de soustraire des décisions administratives à l’arbitraire en permettant de les contester devant une justice indépendante. Cela signifie que les jugements du tribunal constituent une deuxième évaluation tout à fait indépendante de celle de l’administration. De plus, les situations géopolitiques complexes et mouvantes sont au cœur même des évaluations des demandes de protection internationale. Par exemple actuellement, nous ne disposons pas d'une information exhaustive sur ce qui se passe en Ethiopie. Cela n'empêche pas ni l'administration ni les juridictions de prendre des décisions.
Enfin, la procédure d’asile est une procédure individuelle qui s’appuie sur des critères déterminés par la Convention de Genève, des règlements européens et la loi nationale. Donc selon nous, il n’y a pas de raison légitime de suspendre les décisions de l’administration ni celles des juridictions administratives.
Il serait grave d'assumer si simplement qu'au fond, tout ça n'est que politique.
Demandes relatives à la situation en Afghanistan - août/septembre 2021
Face à la dégradation de la situation sécuritaire dans leur pays d'origine, de nombreux Afghans présents au Luxembourg ont consulté Passerell pour chercher un moyen de protéger les membres de leur famille. D'autres, déboutés de la protection internationale, s'inquiètent du flou administratif et juridique dans lequel ils se trouvent au Luxembourg et d'un potentiel renvoi en Afghanistan.
De nombreux juristes bénévoles ont ainsi travaillé à la création de lettres afin d'introduire des demandes de regroupement familial ou, le cas échéant, pour introduire une nouvelle demande de protection internationale sur base d'éléments nouveaux.
Afin que ces modèles soient accessibles au plus grand nombre, ils peuvent être téléchargés ici. Trois formats génériques sont disponibles selon que :
- un bénéficiaire de la protection internationale souhaite introduire une demande de regroupement familial ;
- un citoyen de l'UE sollicite une autorisation de séjour pour des membres de famille ;
- une personne déboutée introduise une nouvelle demande de protection internationale sur base d'éléments nouveaux.
Ces modèles sont génériques et doivent être adaptés selon la situation des personnes concernées. En aucun cas, l'association ne peut remplacer le rôle et la compétence d'un avocat à la Cour : nous ne sommes pas des avocats.
Afghanistan is not safe : il est urgent d’agir !
La dégradation de la situation sécuritaire en Afghanistan a atteint son apogée par la prise de pouvoir des Talibans. Il est maintenant clair, même pour celles et ceux qui ont ignoré les alertes de la société civile, qu’il y a un vrai danger généralisé pour la sécurité de la population, particulièrement des femmes, des membres des minorités religieuses et ethniques, à la communauté LGBTQI+, ainsi que des hommes et femmes ayant travaillé ou collaboré avec les armées ou les organisations étrangères. Depuis fin 2019, nous lisons dans les refus de protection internationale des afghan.e.s que les Talibans représentent une crainte hypothétique et que la situation en Afghanistan n’est plus d’une gravité telle que chaque individu y risquerait sa vie ou de subir une atteinte grave. Il y a lieu de revoir aujourd’hui cette position.
Pour les associations et organisations signataires, l’étendue et l’urgence de la crise oblige le Luxembourg et l’Union Européenne à agir à plusieurs niveaux, sachant que depuis plusieurs années, l’Afghanistan figure parmi les principaux pays d’origine des demandeur.se.s de protection internationale au Luxembourg et en Europe.
Après l’annonce du rapatriement des ressortissant.e.s et résident.e.s luxembourgeois.e.s se trouvant sur le territoire afghan, il y a lieu d’assumer nos responsabilités en contribuant activement à la mise en sécurité des personnes risquant la vindicte du pouvoir en place. Or, la communication du Gouvernement laisse entendre que seul.e.s les hommes et femmes ayant travaillé ou collaboré avec les armées ou les organisations étrangères pourraient profiter de celui-ci et qu’il serait en cours ou en préparation.
Pour les signataires, la réponse à l’urgence humanitaire doit être beaucoup plus large et holistique.
Nous demandons :
- Le maintien de l’arrêt complet des renvois pour des demandeur.se.s de protection internationale afghan.e.s débouté.e.s ;
- Le réexamen de la situation des personnes déboutées du droit d’asile qui se trouvent au Luxembourg à la lumière de la nouvelle situation politique et militaire et l’octroi d’une protection pour ces personnes ;
- La prise en considération spéciale et différenciée de la situation actuelle : accélérer le traitement des dossiers de protection internationale et de regroupement familial en cours en prenant en compte la violence extrême qui règne en Afghanistan ;
- L’ouverture de couloirs humanitaires sûrs pour celles et ceux qui voudront fuir et demander la protection internationale en Europe ;
- L’octroi de visas humanitaires pour les membres de famille des afghan.e.s ayant obtenu le statut de réfugié ou la protection subsidiaire au Luxembourg.
Il est urgent d’agir !
Signataires : ACAT, Afghan-Lux community outreach, Amnesty International Luxembourg, ASTI, CLAE, Open Home, Passerell, Time for Equality, Reech Eng Hand, RYSE
61% de refus d’asile pour les Afghans au Luxembourg : un changement brutal et injustifié au vu du regain alarmant de l’insécurité en Afghanistan.
Les organisations ACAT, Afghan-Lux community outreach, ASTI, CLAE, Open Home, Passerell, Time for Equality, Reech Eng Hand, RYSE appellent le Ministre à porter un regard lucide sur la situation sécuritaire en Afghanistan, et un discours clair et rassurant pour les demandeurs de protection internationale présents au Grand-Duché.
Le départ des troupes américaines laisse la place aux ambitions des Talibans
Alors que la situation sécuritaire se dégrade dans le contexte du départ des troupes américaines en Afghanistan, la question n’est plus de savoir si les Talibans vont prendre le pouvoir mais comment ils vont le prendre. Aujourd’hui, le territoire afghan est en proie à une coexistence violente entre Talibans et armée régulière. Cela prolonge le climat d’insécurité pour les civils, dont les membres de la minorité Hazara, et menace directement, l’accès à l’éducation, le droit des femmes et l’espoir d’une paix durable.
Samedi 8 mai, plus de 85 personnes sont mortes, plus de 150 blessés, dont une majorité de jeunes adolescentes. L’attentat, qui visait une école pour filles fréquentée principalement par la minorité Hazara, n’est pas revendiqué. Les talibans ou l’Etat Islamique ? Ce n’est pas certain et malheureusement, il y a le choix !
La France a décidé en urgence de rapatrier 600 collaborateurs afghans qui ont directement coopéré avec la France comme s’ils s’attendaient à des représailles massives de la part des Talibans. L’Australie a décidé de fermer son ambassade jusqu’à nouvel ordre.
La chute vertigineuse du taux de protection des Afghans au Luxembourg
La situation sécuritaire chaotique en Afghanistan était reflétée au travers de l’octroi de la protection internationale des demandeurs de ce pays : quasiment tous les Afghans –à l’instar des Syriens- recevaient la protection internationale (90%). C’était ainsi depuis que la Cour administrative de Luxembourg, en janvier 2018 avait reconnu «une violence aveugle eu égard à la situation de conflit armé interne sévissant actuellement en Afghanistan».
En fin d’année 2019, alors que l’Afghanistan ne présentait aucune amélioration sécuritaire durable, le Ministre en charge de l’Asile a commencé à délivrer de nombreux refus aux demandeurs d’asile afghans.
Au point qu’en 2020, les décisions de protection internationale sont à 61% des refus (contre 7% en 2019 et 0% en 2018).
Il s’agit d’une rupture brutale qui ne trouve aucune justification sur le terrain afghan.
En 2021, la Cour administrative revient sur sa jurisprudence et expose désormais les personnes déboutées à une expulsion vers l’Afghanistan, en affirmant que « la situation en Afghanistan n’est point encore stabilisée et que de nombreux attentats ont été commis lors des dernières années, entrainant de nombreux morts et blessés, mais que la situation n’est pas telle que le seul fait d’être originaire d’Afghanistan et plus particulièrement, de la ville de Kaboul, [ … ] n’est pas suffisant pour qu’une protection subsidiaire soit automatiquement octroyée à un citoyen de ce pays et de cette ville ». Ces nouvelles décisions viennent confirmer la voie de l’expulsion vers l’Afghanistan.
La suite est accessible en téléchargeant le document.
Jusqu’à fin 2019, les juridictions administratives du Grand-Duché reconnaissaient que le « conflit armé interne » en Afghanistan était d'une telle violence généralisée qu'« en cas de retour en Afghanistan, [un requérant court] un risque réel de subir des atteintes graves » (Cour Administrative, 4 janvier 2018, N°40256C du rôle). Les atteintes graves sont définies comme suit : « des menaces graves et individuelles contre la vie ou la personne d’un civil en raison d’une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international. » (Article 48 c. de la Loi du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire)
Dans une décision récente (Tribunal Administratif, 14 janvier 2021, N°44166 du rôle) le Tribunal Administratif est revenu sur cette jurisprudence de la Cour Administrative : "Il convient en outre de soulever que la situation en Afghanistan n'est pas telle que tout ressortissant afghan serait à risque d'un traitement inhumain et dégradant."
Jusqu’à fin 2019, les juridictions administratives du Grand-Duché reconnaissaient que le « conflit armé interne » en Afghanistan était d'une telle violence généralisée qu'« en cas de retour en Afghanistan, [un requérant court] un risque réel de subir des atteintes graves » (Cour Administrative, 4 janvier 2018, N°40256C du rôle). Les atteintes graves sont définies comme suit : « des menaces graves et individuelles contre la vie ou la personne d’un civil en raison d’une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international. » (Article 48 c. de la Loi du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire)
Dans une décision récente (Tribunal Administratif, 14 janvier 2021, N°44166 du rôle) le Tribunal Administratif est revenu sur cette jurisprudence de la Cour Administrative : "Il convient en outre de soulever que la situation en Afghanistan n'est pas telle que tout ressortissant afghan serait à risque d'un traitement inhumain et dégradant."
Passerell propose de faire le point sur les représentations de la situation sécuritaires selon diverses sources provenant d’articles de presse ; de rapports d’organisations internationales et de sources étatiques.
Aperçu sur les demandes d'asile afghanes au Luxembourg
Extraits refus ministériel - Quant au refus de la reconnaissance du statut de réfugié
« Quand bien même des Talibans vous auraient recherché et qu’il y aurait un lien avec les critères de fond définis par la Convention de Genève et la loi de 2015 car vous auriez prétendument révélé leur lieu de séjour, on ignore qu’elles auraient été leurs intentions de sorte que vos craintes sont purement hypothétiques. Or des craintes hypothétiques ne sauraient justifier l’octroi du statut de réfugié »
(…) The Afghan National Security Council said June had the deadliest week of the war, with 291 Afghan soldiers killed in Taliban attacks in one week. Javid Faisal, a spokesman for the National Security Council, said the Taliban attacks in the past three months rose nearly 40 percent compared with the same period last year.
« Ajoutons à cela que vos allégation sinon autrement étayées ou développes selon lesquelles les Hazâras seraient « ségrégués » ne sauraient pas non plus suffire pour justifier pour votre chef l’octroi du statut de réfugié. En effet, votre seule appartenant à l’ethnie des Hazâras ne saurait suffire pour justifier dans votre chef une crainte fondée de persécution, alors que vous ne faites pas état d’aucune incident concret qui serait lié à votre ethnie et une prétendue « ségrégation ». Ainsi, vos craintes doivent de nouveau être perçues comme étant totalement hypothétiques"